mercredi 9 juillet 2008

Mes Chers Compatriotes


Mes chers compatriotes,

Il n'y a pas que la traque des sans-papiers.
Il y a aussi celle des Français aux papiers douteux.
Ceux qui sont nés à l'étranger.
Ou bien dont les parents sont nés à l'étranger.
Fussent-ils, ces parents-là, eux-mêmes Français.

Depuis six mois environ (c'est ce qu'on nous a dit à la préfecture) des consignes sévères ont été données.
C'est la fin du laxisme, à l'identité (nationale).
On vérifie tout.
A Lyon (où j'habite), les fonctionnaires sont débordés.
Ils n'arrivent plus à traiter les dossiers de ceux qui, venus faire renouveler leur carte d'identité ou établir un passeport, posent problème.
Il y en a trop.
Il y en a de plus en plus.

En conséquence, des mesures drastiques ont été prises.
Le service n'est plus ouvert que le matin.
Quatre jours par semaine seulement.
De neuf à douze (mais il ne reçoit que jusqu'à onze heures).
C'est pour contenir l'afflux des demandes.
Ceux qui arrivent après neuf heures arrivent trop tard : il y a deux heures de file d'attente.
L'après-midi, le service traite les dossiers de ces Français suspects.
Qui avaient autrefois des papiers.
Mais à qui on n'en fournit plus.
Qui reviennent cent fois avec des justificatifs de nationalité.
Mais ça ne suffit jamais.
Car maintenant il faut tout vérifier.
Y compris les justificatifs des justificatifs.
Et ainsi de suite.


J'imagine que chaque cas est un peu particulier, mais je vais vous raconter celui de mon fils Jouan; ça vous aidera à voir de quoi il est question.

Jouan a 25 ans.
Il est né à Montpellier (Hérault), d'un père Français (moi), mais d'une mère Belge.
Il est programmeur chez Arkane, une boite de Lyon qui fabrique des jeux vidéo, et travaille souvent (par visio-conférence) avec d'autres gars établis à Austin (Texas), où Arkane a également un studio.
Il s'est donc dit, l'année dernière, qu'il ferait bien d'avoir un passeport, dès fois qu'on l'envoie à Austin, par exemple.

Il s'est pointé à la Préfecture de Lyon, muni de tous ses papiers (extrait d'acte de naissance, carte d'identité, d'électeur, livret de famille, que sais-je encore).
Il croyait que ça serait facile, à part la file d'attente.

A la préfecture de Lyon, on a d'abord tiqué sur sa mère Belge.
Car les accords bilatéraux entre la France et la Belgique ne permettent pas que l'on soit Français si l'on est Belge.
Parait-il.
On a donc demandé à Jouan de fournir un certificat de renonciation à la nationalité belge.
Et pourquoi pas? me direz-vous.

Jouan s'est adressé au consulat de Belgique pour obtenir ce certificat.
Malheureusement, la Belgique pratique un strict droit du sol.
Les enfants de Belge nés hors de Belgique ne deviennent Belges que s'ils en font la demande expresse.
A l'age de 18 ans.
Après c'est trop tard.
Tu n'es pas Belge.
Tu n'as jamais été Belge.
Tu ne seras jamais Belge.
Le consulat a donc gentiment expliqué à Jouan qu'il ne pouvait lui faire un acte de renonciation à la nationalité belge.
Puisqu'il n'était pas Belge.

A la préfecture, ils n'ont pas beaucoup aimé que Jouan ne fournisse pas le papier demandé.
Mais ils ont passé l'éponge.
Ils ont préféré s'intéresser à son père (moi).
Français né de mère française et de père français.
Mais au Maroc.
(Du temps des colonies.
A l'époque où le drapeau tricolore flottait sur ce pays.)

Ici, une petite explication s'impose.
Il y avait autrefois toutes sortes de colonies.
Il y en avait qui étaient des départements français, comme l'Algérie.
Et c'était la France.
Il y en avait qui étaient des protectorats, comme la Tunisie ou le Maroc.
Et c'était l'étranger.

La préfecture a voulu vérifier si le père de Jouan (fonctionnaire de l'Education nationale, par ailleurs) était réellement Français.
Puisqu'en définitive, il était né à l'étranger.
J'ai fourni à Jouan tous les papiers requis, j'y ai même ajouté un vieux certificat de nationalité, établi par un juge d'Alès en 1970 pour je sais plus quoi, et que j'avais retrouvé par hasard.
Autant vous le dire tout de suite : cette débauche de paperasses n'a impressionné personne en préfecture.

C'est plutôt le cas de ma mère (la grand-mère de Jouan) qu'ils ont trouvé curieux.
Elle se prénomme Marie de Fatima.
Ses parents (les bisaïeuls de Jouan, donc) étaient Portugais.
Elle-même est née à Casablanca (à l'étranger, donc).
Et n'a acquis la nationalité française qu'en se mariant avec mon père.
(il y a pile soixante ans cette année, en 1948).

C'est logiquement sur mon père (le grand-père de Jouan) que s'est reportée l'attention de la police.
Puisque dans le fond, s'il n'avait jamais été français, ma mère n'aurait eu aucune raison de devenir française.

Mon père (donnons lui son nom, Louis, pour la clarté du débat) est mort depuis longtemps.
Il était né à Casablanca.
(Je sais, ça n'arrange rien).
D'un père Français.
(C'est reparti pour un tour!)

Je n'ai pas connu mon grand-père, qui est mort en 1939, bien avant ma naissance.
Il avait fait Verdun.
Mais je vous arrête de suite : ça ne prouve rien.
Louis aussi a fait la guerre, dans la Première Division Française Libre (Campagne d'Italie) et la Première Armée Française Libre (débarquement en Provence, blessure en Allemagne).
(Vous pensez bien qu'on l'a essayé, le coup du livret militaire.)
Ce n'est pas une preuve de nationalité, nous a-t-on dit.

Donc ce grand-père?
(le bisaïeul de Jouan, pour ceux qui suivent)
Celui qui a fait Verdun (ce qui ne prouve rien)?
Il se prénommait Blas.
Blas José.
(Je sais, c'est pas normal).
Il était né à Oran, au XIXème siècle.
C'est-à-dire en France, dans un département français.
(Ouf! Sauvés!)

La préfecture était presque d'accord pour que Jouan ait son passeport.
Elle préfèra toutefois être mieux renseignée sur ce Blas José, aux prénoms exotiques.
Elle a demandé à mon fils de s'adresser non plus à Nantes, où sont conservés les dossiers des Français nés à l'étranger.
Mais à Aix-en-Provence, aux Archives, où sont les morts.
Pour voir un peu si ses ancêtres avaient le droit d'être Français lorsque l'Etat les considérait comme tels, de leur vivant.

Et là, je sens que ça va se gâter.
En 1962, au moment de l'indépendance de l'Algérie, l'OAS a beaucoup plastiqué.
Elle ne voulait rien laisser aux Arabes.
Elle faisait sauter les bâtiments publics.
A Oran, l'Etat Civil a brûlé.
Il n'en est rien resté.
Que sont devenues les traces du bisaïeul de Jouan?
J'aime mieux ne pas y penser.
Quand à son trisaïeul, inutile d'insister.
Lui n'était pas Français.
Il était d'Almeria.
En face d'Oran.
En Espagne.

Combien sommes-nous dans ce cas, mauvais Français, à ne plus pouvoir obtenir nos papiers d'identité?
A Lyon, c'est certain, plusieurs centaines.
Peut-être des milliers.
Combien sommes-nous en France?
30 000, 300 000?
A ne plus avoir de papiers, ou à être menacés de ne plus en avoir.
Quand ceux que nous possédons seront périmés.
Pour Jouan, c'est dans deux ans (sa carte d'identité date de 2000).
Moi, c'est en 2014 (je l'ai faite renouveler il y a quatre ans).
Quelle sera notre situation administrative?
Sans-papiers.
Nous ne serons pas expulsables (vers quel pays? nous n'avons droit à aucune autre nationalité que française.)
Nous resterons probablement Français.
Ce serait trop compliqué de nous dénationaliser.
(Pour ne pas dire infaisable).
Mais des Français bizarres.
Qui ne pourront pas sortir de France, fût-ce dans l'espace de Schengen.
Qui dépendront du bon vouloir de la police sur le territoire national.
Dont les enfants n'auront pas droit aux bourses pour faire leurs études.
Des Français en Sarkozie comme il y eut des Juifs en Allemagne,
espérant qu'à la longue la situation s'arrange.

Mes chers compatriotes, je ne vous écris pas pour vous faire pleurer sur mon sort.
Je vous écris pour vous avertir qu'un régime policier est installé dans notre pays.
Cette fois-ci pour de vrai.
Pas un régime policier seulement pour les pauvres, les mal-blanchis et autres terroristes.
Un bon vieux régime policier pour tout le monde.
Avec de bonnes vieilles méthodes d'espionnage, d'écoutes, de cambriolages suspects, de délations, de camps de concentration, et de difficultés administratives sans fin.
Il ne se limite pas à persécuter les Africains, les Asiatiques ou les Ukrainiens.
Il s'attaque à tous.
Aujourd'hui nous.
Demain vous, je le crains.

36 commentaires:

Anonyme a dit…

Quand je dis que nous sommes dans un état policier ,j'entends :"eh ben ,on voit que tu n'as aucune idée d'un tel état,va en Corée ou en Chine ou ,..ou...tu racontes n'importe quoi ,heureusement que la police est là avec toute cette délinquance...la police ,il en faut ..."

Gérard Amate a dit…

C'est marrant, cette idée que la police est nécessaire.
Pendant des millénaires, il n'y en a pas eu.
Dans la France rurale, il n'y en avait pas. J'ai perso connu deux bleds, Uzes jusqu'aux années 80, et la ZUP de Nîmes dans les années 90, où il n'y en avait pas (à la zup c'est parce que le commissariat en a eu marre d'être saccagé, il a été fermé); ça fonctionnait parfaitement.
Je crois que les keufs, c'est comme la pub : rien ne prouve que c'est utile, mais une fois que c'est installé dans le paysage, ça devient incontournable.
A part ça, un état policier, c'est un état où la police détermine tes droits : sur plein de secteurs, on y est; et sur plein d'autres, on y va.
Pas par hasard : par la volonté du prez, ancien ministre de la police.

Anonyme a dit…

Je crois que la grande majorité de la population, mais peut-être prends-je mes désirs pour des réalités, a besoin d'ordre, réclame de l'ordre (maintenant qu'est-ce que ça veut dire ? J'imagine la sécurité (routière, sociale, etc.), la "paisibilité" (moins d'agressivité (verbale, physique, etc.)).) Cet ordre, souvent écrit avec une majuscule, d'aucuns s'imaginent que c'est la police qui en est le garant, ou la condition. En bref que le vivrensemble de l'autre gourde n'est possible qu'avec le jeveuxvoirquunetêtedanslacaméra de l'autre excité.
Entre l'ordre sans police de la mafia, celui de plus en plus prégnant des cartes à puce et des caméras et celui "naturel" des anarchistes (mais je ne crois pas à une anthropie inversée (ça doit porter un nom ? la nature peut-être ?)), il ne reste aucun espoir pour les non-croyants, sinon disparaître.

Abracadabra...

JPB

Gérard Amate a dit…

Mon cher Jean-Paul,
Bien qu'anar, je n'ai aucun don pour la métaphysique.
Je me contente de constater.
Que, par exemple, s'il y a un embouteillage à un carrefour, c'est que des flics y règlent la circulation.
Ces gens-là ne servent qu'à une chose : réparer les dégâts qu'ils occasionnent.
C'est pourquoi plus il y en a, plus il en faut, et plus on en met, plus ça va mal.
Je parle de la police quotidienne.
Après, qu'il faille des Dupin et des Poirot pour résoudre les énigmes criminelles, c'est un autre problème.

Anonyme a dit…

Tu vois la police qui règle la circulation aux embouteillages ? On ne vit pas dans le même pays, c'est pas possible ! Dans mon pays à moi elle fait des contrôles de vitesse et souffler dans le ballon. A moins que tu ne considères les feux rouges comme des flics modernes.

Pour une fois que j'étais à peu près d'accord avec toi (Pendant des millénaires, il n'y en a pas eu.)... Bon sur la ZUP, pas trop (d'accord) - j'assimile plutôt cet ordre à un ordre mafieux. Mais nous ne vivons pas dans le même pays et n'avons pas les mêmes ZUP certainement (Aïe, pas taper).

Gérard Amate a dit…

Pour les embouteillages, je n'en disconviens pas : la raison prévaut, on n'y voit plus trop les keufs.
Mais parfois, ils font une rechute : et là, on constate quels sont leurs effets.
A la zup (où je vêcus jusqu'il y a deux ans), il n'y a pas d'ordre mafieux.
A moins que l'on ne considère comme une mafia une population entière qui s'autorégule.
Les dealers ont d'autres occupations que celles de l'ordre public, et qui demandent un minimum de discrétion.
L'omerta existe, parce que l'honneur est une chose à laquelle tiennent ces pauvres-là; et l'on trouve aussi dans les quartiers quelques hommes d'honneur : faut-il le déplorer?

Anonyme a dit…

Je savais que je me ferais taper.
Pour ce qui est de l'honneur, de la Parole, tu prêches un convaincu ; ce sont des notions qui se perdent comme le goût des fraises et des tomates ; et j'imagine que l'honneur est assez équitablement réparti, géographiquement, socialement, culturellement (zones qui ne se recoupent pas exactement).
Plutôt qu'un Etat policier (j'ai l'impression que la France n'est qu'une avant-garde, que ce contrôle est de plus en plus fort un peu partout dans le monde (sauf dans les zones de non-droit comme on dit - et ce n'est pas mieux, enfin pas encore mais peut-être qu'un jour ce le sera).
Bordel un Etat policé (si je commence à parler de civilisation les coups vont redoubler) c'est possible que dans mon imagination ?

Gérard Amate a dit…

Gardons l'esprit pratique : l'application avec rigueur des règlements paralyse toute institution.
c'est même une forme de grève, parfois : la grève du zèle.
C'est un comportement intenable.
La police ne le tiendra pas longtemps.
D'ailleurs, dans le cas qui nous occupe, cette pratique, si elle était soutenue, deviendrait tout bonnement illégale.
Tout citoyen a droit à un passeport.
Et jusqu'à preuve du contraire, Jouan est citoyen français.
La police reviendra à des pratiques viables.
Sauf qu'elle choisira ceux qu'elle favorisera (puisque les instructions de rigueur qu'on lui a données ne seront jamais contredites : tel est l'usage dans la fonction publique).
Elle n'appliquera plus la loi : elle la fera.
C'est cela un état policier : tant de lois, tant de règles, que personne ne peut les observer en totalité, et que tout le monde est coupable de quelque chose.
Après quoi, la police n'a plus qu'à choisir dans la masse qui ira en taule et qui continuera à être libre, provisoirement.
Je crois en effet que les Etats vont vers ces systèmes, où simplement dire Bordel, comme tu viens de le faire, sera un délit attentatoire, par exemple, à la dignité de la femme.
Mais si on avait laissé faire les Etats, nous en serions encore à être roués en Place de Grève pour propos blasphématoires, ou crime de lèse-majesté.
Nous avons su les combattre et même les détruire.
Il ne reste qu'à recommencer.

Anonyme a dit…

Oh mais je ne suis pas si éloigné de toi, je t'assure. M'échappe complètement la compréhension de ce besoin d'emmerder le monde. Je ne comprends pas comment le petit Jouan ne peut pas avoir un passeport en 48 heures. C'est ce que j'appelle un recul de la civilisation. Je m'interroge, est-ce que c'est fait exprès (pour faire chier en gros), ou est-ce que ça répond à une politique sécuritaire (auquel cas est-ce que c'est "efficace" ?) ?
De toute façon, je me sens de plus en plus largué, incompris.
Je répète : Bordel qu'est-ce qu'il faut pour que nous puissions vivre dans une société tranquille, sans agressions (sans publicité par exemple parce que cette agression-là devient elle-aussi "impossible"), dans un monde où l'on peut regarder dans les yeux n'importe qui en toute confiance, sans arrière-pensée (le cul peut-être mais alors sans risquer un procès) ?
Je ne crois pas que l'Etat soit responsable de tous les maux, au contraire, il peut être protecteur (c'est même sa seule justification). Un peu comme un médicament dont on ne doit pas dépasser la dose prescripte (là je m'éloigne de toi, tu me vois encore ?).

Gérard Amate a dit…

Pour Jouan, ce n'est absolument pas pour faire chier.
Jouan est un petit jeune sympa, décidé, de gauche mais sans excès (c'est d'ailleurs mon drame), footballeur, les yeux bleus (n'oublions pas que sa mère est belge), et particulièrement poli.
La fonctionnaire qui l'a reçu est la première désolée de ce qui arrive : oui, mais voilà, il y a des ordres, et elle a peur, si elle ne présente pas un dossier nickel, de se faire elle-même emmerder.
C'est une politique sécuritaire : plutôt mille innocents en prison qu'un seul coupable dehors!
Et sécuritaire, tu es bien gentil. j'appelle ça un régime policier.
Car, ne l'oublions pas, tout ceci est illégal : un recours en conseil constitutionnel gagnerait systématiquement (sauf que c'est deux ans, du pognon, et qu'en catastrophe ils te refileraient tes papiers, histoire de dire que ce n'était qu'un petit retard pour lequel il n'y avait pas besoin de faire tant d'histoire, et ça serait pour ta pomme tous les frais).
Quant à ta société rêvée, n'oublie pas que la notre est tenue par la bourgeoisie, qui n'a pas d'autre rêve que de faire de la thune et de sécuriser les itinéraires des camions de la Brink's.
Si mettre du Mamadou en stalag peut aider à finaliser ce projet, elle n'y voit aucun inconvénient.

Anonyme a dit…

Il faudra que tu me le présentes, je sens qu'il est tout à fait mon genre.
Bon, je disparais.

Gérard Amate a dit…

C'est toujours comme ça sur le web : on croit rencontrer des êtres d'une grande délicatesse d'âme, et l'on tombe systématiquement (c'est une règle qui ne souffre aucune exception) sur des obsédés sexuels (trop) souvent invertis.

Anonyme a dit…

Une histoire très intéressante , gg.
Eh, oui, "ils n'en mouraient pas tous, mais tous étaient touchés".
Ca fait pas bizarre de finir par se dire: les Noirs, les Arabes, les sans pap, les traîne-misère, d'accord, à la limite, mais pourquoi moi?
C'est ce que se disent les cadres actuellement. Les ouvriers, les sans-grade, les feignasses qui papotent devant la machine à café, d'accord, c'est pour ça que j'ai voté nain connu, mais pourquoi moi?
Parce que tout le monde va y passer, parce que ce sont vraiment les obscurantistes qui sont au pouvoir et qu'ils n'ont pas de limite, à part leur entendement.
Ils se voient invincibles. Alors, après s'être attaqués aux épouvantails qui leur ont permis d'être élus, ils s'attaquent de front à leur électorat.
Leur intérêt passe avant tout. Et ils y vont au bulldozer.
Ils ont un boulevard devant eux, faut dire.
Parce qu'ils ont trouvé aussi veules qu'eux. Ils ont ridiculisé le PS et le Modem, ils ont humilié les syndicats sans réaction de leur part à tous.
Ils créent des commissions et des Grenelle à tour de bras et à grands frais pour berner le gogo, laisser l'illusion de la démocratie et faire parler les médias.
Le PC ressasse les vieilles lunes, la LCR en profite pour recruter sur son terrain, au PS, les roitelets (- ettes) se déchirent, renient le socialisme et n'en peuvent plus de se compromettre avec ce pouvoir liberticide et les syndicats se couchent pour conserver leurs petits privilèges.
Devant tant de lâcheté et de médiocritude, il n'y a pas de raison qu'ils ne triomphent pas.
Ils démantèlent tout le tissu social? ils enferment, répriment arbitrairement? Qui cela dérange? Seulement ceux qui sont touchés. Et ceux-là, pour l'instant, sont impuissants parce que marginalisés, voire frappés d'ostracisme.
Alors, quand tout le monde sera dans la même galère, peut-être qu'il y aura une prise de conscience collective.
Etat policier? Ben oui. On est en plein dedans depuis 2002.
Fichage, prélèvements ADN arbitraires, harcèlement bureaucratique, incarcération de manifestants, rétention illimitée d'innocents, tabassage, etc.
Nous allons à grands pas vers le Patriot Act états-unien.
Et, si nous ne réagissons pas, vers le fascisme, quoiqu'en disent certains. C'est comme cela que ça a commencé.

Gérard Amate a dit…

Ma chère Emcee,
Ce régime policier, en effet, ne date pas d'hier, il empire seulement, jour après jour, et là, avec notamment les camps de concentration pour les indésirables, on fait la culbute : nous ne sommes plus un peuple libre.
L'humiliation, l'insulte, la transgression des codes de la vie civilisée, sont chez Sarko une méthode de gouvernement, parente du viva la muerte! du général Mola.
Ce n'est pas lui qui a asservi la gauche : elle y est venue d'elle-même, comme une grande.
Passons sur le PS et la Cfdt, mais la Cgt intègre en 1999 la Ces : lis-en quelque jour la profession de foi, tu seras édifiée. Et tu sais quoi? Devine qui représente au directoire de la Ces les 5 syndicats français qui en sont membres...
Ben oui, un syndicat de confiance : pas la Cfdt, pas la Cftc, pas Fo, pas l'Unsa, mais la cégète.
Idem pour le Pc : la leçon qu'ils ont tiré de l'implosion de l'Urss, c'est que la lutte de classe n'existait pas.
En conséquence, ils ont abandonné le terme de camarade et adopté celui de citoyen.
Sarko n'a pas créé cet état de fait, mais alors que la droite faisait bien attention de ne pas ébruiter ces menus changements, afin de manoeuvrer et faire manoeuvrer la populace, Sarko rend éclatante l'allégeance des organisations de travailleurs à la bourgeoisie.
C'est sa méthode, directe.
Elle a son efficacité : les peuples justifient les injures dont ils ne se vengent point.
C'est ainsi que s'établissent et prospèrent les régimes d'oppression

Anonyme a dit…

Tout à fait d'accord avec toi.
c'est bien la "gauche" qui est seule responsable de cet état de fait.
Il n'a fait que la ridiculiser davantage et dévoiler sa veulerie au grand jour. Ne serait-ce qu'en en appelant certains au gouvernement - qui se sont empressés d'accourir lui baiser les mains (et les pieds) et d'accepter toutes les humiliations pour se maintenir en place.
Sans parler de tous les autres pantins du PS.
Mais la "gauche de gauche" n'a pas non plus été glorieuse. Les dirigeants, du moins.
Quant à la Cégète, c'est bien elle (avec la FSU) qui - entre autres -a fait capoter les mouvements sur les retraites.
Alors, finalement, il ne reste plus grand monde en qui avoir confiance.

Gérard Amate a dit…

Il reste nous.
Au pays de la république, le peuple de la révolution.

Anonyme a dit…

Oh ! C'est pour de vrai ta méchante sortie là ?
Me barre à Alès retrouver des compatriotes qui ne me jetteront pas des pierres. J'espère.

Gérard Amate a dit…

Toulon, il a fallu la convertir à coups de canons, pour qu'elle soit républicaine : c'est un peu un cas.

Anonyme a dit…

peut-être. Je n'étais pas née.
Et je ne suis pas Toulonnaise. ;-)

Tu dis, "il reste nous". Oui, et on est quand même quelques-uns, en ce moment à piaffer.
Mais voulons-nous tous la même révolution?

Gérard Amate a dit…

tout dépend de ce qu'on appelle vouloir.
si l'on veut bien considérer qu'en 68 on a retrouvé les mêmes exigences (communauté des biens, amour libre, égalité de tou(te)s, libre parole, mépris de l'Etat) qu'on avait vu en 17, en 71, en 89, et dans tous les siècles qui nous ont laissé des traces écrites de tels mouvements, depuis le Moyen Age, et sans doute dès l'Antiquité (bagaudes), alors oui : une aspiration si durable est universelle.
Pour le reste, peu importe : 89 voulait abattre l'Eglise, et c'est la République qui a surgi.
On ne peut décider de ce que donne une révolution, c'est un temps à part, dont la réalité n'a rien à voir avec ce qui précède et ce qui suit.
L'essentiel est de savoir comment on veut la faire : il me semble que l'autogestion des luttes (AG décisionnaires, comités de grève, coordinations), bien que farouchement combattue par le pouvoir (FSU comprise) fait aujourd'hui consensus.
En ce sens oui, nous voulons tous la même révolution.

Anonyme a dit…

Peut-être bien. Je ne suis pas si optimiste, à voir comment la gôche coupe les cheveux en 4.
Tiens, il y a ça qui circule:
http://tous-ensemble.dyndns.org/
Qu'est-ce que tu en penses?

Gérard Amate a dit…

Il n'y a qu'une action "tous ensemble et en même temps" qui puisse changer le cours des chose : la grève générale reconductible, mettre le pouvoir en danger, mettre l'ordre social en danger.
Le reste, ils s'en foutent; à juste titre.
Nous savons que nos syndicats ne lanceront jamais un tel mot d'ordre, c'est une question de principe : nec sutor ultra crepidam; ils laissent le soin du politique au Ps ou au PC dans le meilleur des cas, à l'Ump dans les autres cas.
Ceci, bien sûr, indispose la base, surtout la base d'extrème-gauche : d'où cette pétition.
Mais regarde les, ces signataires syndiqués : ce mot de grève, ils n'osent pas même l'écrire.
Déjà ils protègent leurs appareils, se contentant de tirer sur le bouc Chérèque, qui certes pue, mais n'est pas plus un traître que les autres.
Regarde-les : ils mendient un peu de combativité de la part de leurs chefs.
Ils ne récolteront que du mépris.
Et en guise de hors-d'oeuvre, le mien.

Anonyme a dit…

C'est bien ce que je pensais...
C'est une pétition qui tourne dans les fils de commentaires.

Déjà, signé FSU, faut avoir vocation à l'abnégation et à la souffrance. Parce que c'est pas Aschieri qui changera les choses. Qu'est-ce qu'ils attendent pour foutre le camp de cette structure?
Les plus valables à la base se font marginaliser vite fait.
Quant à Thibaut ... pas mieux.
Alors, bien sûr, "tous ensemble", mais sans les pitres.

Gérard Amate a dit…

Cette pétition, cependant, ne veut pas rien dire : c'est un peu le chant du cygne des déçus du stalinisme.
Je les vois bien après cela rejoindre le NPA, à qui je prédis un franc succès aux prochaines européennes.

Anonyme a dit…

Nous vivons dans un Etat où il faut en permanence lutter pour ce qu'on veut nous retirer, où il faut refuser ce qu'on cherche à nous imposer, où il faut bien se tenir droit pour éviter de rentrer dans les moules préfabriqués d'une société sans intérêt autre que la contrainte.

Heureusement, cette situation ne saurait être éternelle.

Dans tous les cas, la grogne monte au quotidien. Viendra bientôt le temps où les "gentils et innocents policiers" se retrouveront en train de taper les "méchants citoyens qui cherchent juste à survivre". Et le lendemain, on tranchera des têtes et on les positionnera bien en vue sur des pics.

Vivement demain, en un mot.

Gérard Amate a dit…

Tout dépend de quelles têtes il s'agira.

Anonyme a dit…

Hum... euuuh... pas la mienne. Moi j'écris de la SF, sauf que sur ce thème, la SF et la réalité se côtoient et se ressemblent anormalement.

Il est clair que si "on" continue dans cette direction, les têtes coupées et piquées seront celles qui auront trompé le plus de gens...

Gérard Amate a dit…

Quand j'étais môme, on se demandait si l'avenir ressemblerait au Meilleur des Mondes (modèle américain) ou à 1984 (modèle stalinien); et bien la réalité dépasse la fiction : on a les deux à la fois.

Anonyme a dit…

Que de bruit pour pas grand chose. Gérard, vous devriez vous réjouir de voir appliquer le mot d'ordre anar "des papiers pour tous, ou pas de papiers du tout !"

Bientôt une armée d'apatrides dans les rues de France, si ce n'est pas une belle image ça...

Grand Fakir Ali a dit…

Le résultat dans tout ça, c'est que dorénavant,le "français" il ne l'est que par intérim. La carte d'identité est devenue un bail de 10 ans, renouvelable selon le bon vouloir de l'administration. A partir du moment ou vos ancêtres viennent d'ailleurs, on contrôle le pédigrée.
Question: combien de millions de français sont d'origine étrangère ou ont un de leurs parents né à l'étranger ?
Sur ce thème, le blog "métèque et mat " article du mois de mars:
http://metequeetmat.blogspot.com/

Gérard Amate a dit…

J'ignorais tout de ce mot d'ordre anar "des papiers pour tous...", qui me rappelle un peu le fameux slogan libertaire "une fiche ADN pour chacun, ou une fiche ADN pour aucun".

Anonyme a dit…

je tiens à vous signaler, que j'ai vécu la même histoire, avec un père officier de l'armée française depuis 25ans etc. mais c'était en 1967.
Donc c'est pas nouveau, faut le savoir. Cà empire, ça c'est sûr. Et il faut le dénoncer absolument. C'est pas la peine d'attendre que nous en soyons au point de la Corée (du nord)

Gérard Amate a dit…

En effet, le problème est ancien, mais on pouvait supposer qu'à la longue il s'atténue (en effet, à quoi ça ressemble d'aller chercher des preuves de nationalité vieilles de plus d'un siècle?).
En réalité il s'aggrave : Jouan, par exemple, né en France n'est pas considéré comme Français à cause de la loi Pasqua qui veut qu'un enfant d'étranger né en France fasse une demande pour devenir Français à 18 ans; demande qu'il ne risquait pas de faire, puisqu'il était déjà Français, etc...
Il y a quelques années, le problème des Français d'Algérie dont l'état civil avait brûlé (il n'y a pas eu qu'Oran) avait fini par être réglé : on ne leur demandait plus de fournir les actes qui n'existaient plus, on se contentait de leur demander ceux qui étaient trouvables.
Manisfestement, avec Brice Hortefeux, on en est revenu à la situation kafkaïenne précédente.

Lyaka a dit…

Bonjour,
et merci,
je suis dans le cas de votre fils à la différence que je suis née à l'etranger ...En Europe mais pas à France donc gros problème.
Je n'arrive pas à renouveller mes papiers et cela fait 10 ans que cela dure...
Plus de droit de vote, pas de possibilités de prendre l'avion,pas de voyages hors Shengen...
Bref, et là je ne parle pas de tous les gens qui paient des imôts depuis plus de 20 ans mais qu'on appelle 'sans-papiers'!
merci de votre récit , il n'y en a pas beaucoup !

A la lourdeur et l'illogisme de l'administration Française s'ajoute une dureté sans equivalent grâce à notre gouvernement.

Lyaka

Gérard Amate a dit…

Et bien, mon fils ça y est, les tuiles arrivent!

Sa boite vient de lui demander de faire un job hors de France (à Los Angeles), et toujours pas moyen d'avoir un passeport!
S'il avait la chance d'être apatride, il pourrait bénéficier du passeport que délivre l'ONU au apatrides.
Mais il a le malheur d'avoir une nationalité, et pas la meilleure en l'occurrence : Français...

Marcel Dubois a dit…

Bientôt une armée d'apatrides dans les rues de France, si ce n'est pas une belle image ça...

Foutaises. L'état donnera toujours des papiers, le principe est déjà posé, et la politique actuelle ne mènera pas à l'absence totale de papiers. Ce n'est pas une politique systématique, et ce billet se trompe sur ce point ("Demain vous"), ou fait une grossière manoeuvre qui ne berne personne.

Ce qui est réellement effrayant, c'est qu'aucun commentateur ne pense à dire l'évidence: depuis quand a-t-on besoin de la permission de l'état pour se déplacer/vivre quelque part ? Les passeports et les papiers sont une prise de pouvoir intolérable de la part de l'état. Et ce n'est que parce qu'ils sont considérés comme une formalité qu'ils sont tolérés.

Si un malabar se poste devant la porte de ma maison, et m'informe que je dois lui demander sa permission, est-ce que je suis vraiment obligé ? Dans la pratique, il est possible que oui. Mais je remarque qu'avant que ce malabar ne soit là, j'étais parfaitement dans mon droit en franchissant la porte de ma maison, et je n'avais aucun problème à le faire non plus.

Donc, le malabar ne me permets d'entrer que dans le sens où il accepte de ne pas interférer. Et de la même manière, l'état nous permets de vivre en france, et de nous déplacer en dehors de la france, que parce qu'il accepte de ne pas interférer. Mais cela est une prise de pouvoir et de domination 'là où il n'existe pas de droit au pouvoir et à la domination.' Donc, cela doit cesser.