samedi 30 juin 2007

Bruno Julliard




J'arrête un peu la littérature, pendant les vacances.

Je le sens pas, en ce moment.


Je vais juste un peu bloguer, histoire de pas rompre le contact.


Par exemple, aujourd'hui, ça va être la fête à Bruno Julliard.
Julliard, le mec de l'Unef, le syndicat étudiant, la pouponnière des stars de la politique.

Le Pen, Hollande, Buffet, pour ne citer que le dessus du panier (de crabes ), ont commencé dirigeants de l'Unef.

Qui a été, suivant les cas, à gauche, à l'extrème gauche ou à droite, à l'extrème droite.

On doit à Cambadélis, alors président du syndicat, la vente de celui-ci au PS, contre un siège de député deux ans plus tard.

Dans ces conditions, on peut s'intéresser au petit Julliard.

Il a certainement de l'avenir.

A « gauche » donc, pour commencer...

Vous avez vu sa tronche (cft supra)?

De gendre idéal, parait-il.

Car on ne compte plus les mères qui haïssent leurs filles.

Non, je déconne, il est très bien, Bruno.

C'est le chéri à sa maman.

(La mère de Bruno est aussi la maire du Puy-en-Velay.)

Son petit était animateur fédéral des Jeunes Socialistes de Haute-Loire jusqu'en 2005, date à laquelle il a été élu président de l'Unef.

Il a alors, au nom de l'indépendance syndicale, rendu sa carte du PS et rompu tous contacts avec le parti.

Sauf avec Hollande et Emanuelli, mais là c'est pas pareil, il s'agit d'amis.

Et maman, bien sûr, mais comment le lui reprocher?

Enfin, bref, la routine : il faut bien que les jeunes avec des dents qui rayent le parquet fassent leurs débuts dans la vie.

Mais Bruno sort du lot.

Là, on a affaire à un spécimen qui n'a pas eu besoin d'apprendre (vite).

Il est tombé dedans quand il était petit.

Il connaissait la combine avant même de savoir qu'elle existe.

Il nous fait un vrai récital, un pur exemple d'activité syndicale.


Acte 1 :

Bruno est élu président de l'Unef, et les manifs anti-CPE éclatent.

N'y voyez aucune relation de cause à effet.

Bruno n'y est pour rien, et pour une bonne raison, c'est que dans la vraie vie, l'Unef n'existe pas.

Il n'empêche, ça chahute grave.

Comme il faut bien controler tout ça, on sort les grands moyens et on exhume l'Unef, morte depuis des lustres, sous la forme du jeune Julliard.

Il est partout, Bruno, sur toutes les chaines, le matin, le midi, le soir, la nuit, à toutes les infos. Il revit, il prend la tête de la grève virtuelle, celle qui passe à la télé, et s'efforce depuis ce poste (cathodique) d'en organiser les modalités pratiques : d'abord et avant tout, lever les piquets de grève! (appelés modestement « blocages », vous vous rappelez?)

Ça tombe bien, justement le Gouvernement et TF1 trouvaient eux aussi malsains tous ces blocages et tous ces bloqueurs

Regain d'enthousiasme à l'égard de Bruno dans les médias.

Car ce n'est pas la grève qui l'intéresse, Bruno, mais l'opinion publique, celle où il est, celle de la télé.

Sur ce terrain (l'opinion), il rejoindra toute la gauche syndicale et gouvernementale qui n'appelle pas à la grève mais à manifester.

Histoire de mobiliser l'électorat (ce chien d'électorat ne l'est jamais assez)

Et qui décréte la fin du mouvement dès suspension du CPE.

Ces bonnes âmes avaient volé au secours du succès afin qu'il n'ait pas lieu sans eux.

Ils ont abandonné le mouvement (provoquant ainsi sa débandade) dès qu'ils en eurent engrangé les bénéfices.

Bien joué, Bruno, victoire sur toute la ligne.


Acte 2 :

2006, RAS.

Bruno écrit un livre, expliquant comment, grâce à lui, la révolte anti-CPE a triomphé..

Tu iras loin, Bruno, on est tous avec toi.


Acte 3 :

2007, Sarkozy arrive, en criant sur tous les toits que sa priorité, le premier truc qu'il fera, c'est de « réformer » l'universiré.

C'est-à- dire la privatiser.

Aussi sec, les étudiants démarrent la grève, déjà, Censier est occupée.

Bruno réapparait enfin sur les écrans.

Il partage les justes craintes des camarades en lutte, mais se demande si c'est bien le moment d'entamer une action.

Les vacances sont trop proches.

(En réalité moins proches que les exams, et surtout les législatives, mais chuuuuuuuttt.)

On n'a pas le texte du projet, on va au casse-gueule, remettons ça à la rentrée, la droite (infame) ne perd rien pour attendre.

Ces arguments massue firent forte impression. La grève fut suspendue et tout rentra dans l'ordre.

Deux mois se passent, et les élections avec.

La semaine dernière, Valérie Pécresse présente le fameux projet.

Comme de juste, Bruno s'insurge.

Inacceptable!

Parodie de concertation!

Retenez-moi ou je fais un malheur!

Deux jours plus tard, nouveau projet, et c'est l'arc-en ciel après l'orage.

Les oiseaux chantent, les fleurs s'ouvrent, Bambi bondit, et les sept nains rentrent du boulot en entonnant Heili Heilo.

Bruno trouve qu'il s'agit d'un exceeeeellent projet.

Meilleur que ça, tu meurs.

Que s'est-il passé?

Apparemment, rien.

Les universités échappent toujours à l' Etat (elles sont régionalisées). Les directeurs auront la haute main sur le recrutement des profs, ils feront appel aux finacements privés, et ils auront toujours au conseil d'administration un tiers de représentants du patronnat.

Les syndicats enseignants hurlent qu'on les égorge, qu'on va direct à la mise en concurrence des facs, à la création de quelques unes de prestige d'une part (pour les bourges), et à la transformation des autres en LEP à bac +5.

Mais pas Bruno, justement, ni d'ailleurs aucun de ses petits copains des autres syndicats étudiants.

Eux voient plutôt la vie en rose.

Car voici que seront créés des postes de vice-président d'université.

En charge des questions de la vie étudiante.

En liaison avec les CROUS.

Et qui seront occupés par les représentants étudiants.

En clair, l'Unef.

Et pour les miettes (mais il n'est pas interdit d'espérer), la Conf' Etudiante et les fachos de l'UNI.

Qui tous ensemble, enfin réunis, crient au miracle!

On va les appeler Monseigneur.

Leur offrir de la LSGPE (Légitimité.Syndicale Garantie Par l'Etat)

Du pognon à distribuer partout.

Et surtout aux amis nécessiteux.

Et les moyens de controler la masse étudiante.


Ils ne devraient pas trop décevoir leurs généreux employeurs.

Et d'ailleurs nous les verrons bientôt à l'oeuvre puisqu'aussi bien, en dépit des émerveillements de Bruno Julliard, ça grèvera grave dans les facs à la rentrée.


Epilogue :

L'Unef n'est pas un cas à part, ni Bruno un exceptionnel ripou.

Il fera bientôt la preuve de son ancrage à gauche en devenant l'élu PS d'une quelconque circonscription (et j'en profite pour adresser à ses futurs électeurs toutes mes condoléances anticipées).

Un peu de curiosité vous prouvera que tous les syndicats partagent les préoccupations radicales de l'Unef ou de l'Uni.

On a vu CGT, CFDT, FO, UNSA, FSU, vendre en 2003 les retraites de la fonction publique contre une participation à la gestion du système.

Ils s'apprètent à vendre le droit de grève contre des mécanismes obligatoires de concertations préalables.

C'est la logique d'un syndicalisme « responsable », que toute la gauche appelle de ses voeux, cft les propositions à ce sujet de Ségolène Royal à la présidentielle.

La lutte principale n'est plus sur le champ de bataille mais à la table des négociations.

Et l'enjeu de cette lutte n'est plus la répartition des richesses mais la répartition du contrôle social.


Bises à tous.

18 commentaires:

Anonyme a dit…

Bravo pour cette démonstration !!!

Anonyme a dit…

Y'a pas de Jukkiard en mairie de Clermont Ferrand ! !

Gérard Amate a dit…

Puuuuutain! Je me suis planté : c'est Le Puy.
Ceci dit, elle s'appelle pas Julliard, mais Arnaud-Landau.
Lui, son nom complet c'est Julliard-Landau.

Morrsch a dit…

Pour mémoire, ce texte publié par CQFD (un mensuel de chômeurs "erroristes" marseillais) dans sa rubrique "faux ami" en avril 2006 :

BRUNO JULLIARD

Bruno Julliard finira-t-il sénateur de Haute-Loire, conseiller de Ségolène ou directeur marketing des Inrockuptibles ? Dans les AG, les paris étaient ouverts. À Marseille, on le jouait gagnant à trois contre un pour un mandat d’administrateur à Kiloutou, mais la cote peut encore évoluer.

Attention cependant : pas de procès d’intention ! Ce n’est pas parce qu’en France le rôle de porte-parole étudiant est le marchepied le plus sûr pour un fauteuil d’élu ou de bouffon du prince que le président de l’Unef va forcément s’engorger dans un double menton de notable socialo.

Ce n’est pas parce qu’il a été membre des « jeunesses socialistes » et qu’il fréquente Hollande et Emmanuelli (comme il l’admet dans Le Figaro du 7 mars), ni parce qu’il a une tête de gendre au poil et qu’il cause déjà la langue de bois verni à la cire d’abeille qu’il faut prédire un avenir sordide à ce pauvre garçon. Si ? Allons, halte aux amalgames.

Il y a deux mois encore, personne ne le connaissait. Mais à la faveur de l’explosion anti-CPE, l’apparatchik du « principal syndicat étudiant » a été bombardé en première ligne. Ça ne rate jamais : les médias veulent un « porte-parole » pour « représenter » les foules rangées à bonne distance derrière lui. Bruno ne les a pas déçus. Le 31 janvier il était sur France 3 chez Ockrent, le 7 février sur LCI, le 8 au forum web du Nouvel Obs, le 27 dans Libération, le 16 mars sur France Inter puis chez Chabot sur France 2, le 17 sur RMC, le 24 chez Ardisson, le 25 sur France Info, le 27 sur Europe 1, le 31 sur RTL puis au JT de TF1, le 1er avril chez Pascale Clark sur Canal +, le 9 chez Schneiderman... Même Duhamel et Bigard ne font pas aussi bien.

Les médias adorent Julliard, il cause comme eux. Convenable, sympa, sachant se tenir à table. Que les organes de presse qui l’invitent soient les principaux vecteurs idéologiques de la précarité, qu’ils biberonnent aux mêmes mamelles que les recruteurs d’employés-kleenex, qu’au fond ils constituent une cible au moins aussi légitime que le CPE, tout ça n’est pas un problème pour Bruno Julliard, ni pour l’Unef.

Peut-être y a-t-il là un bon critère pour tâter le muscle d’une organisation qui se veut contestataire : sa capacité ou non à réfléchir au bon usage des médias, s’il faut leur parler, si oui à qui, quand, comment et à quelles conditions. Pourquoi par exemple ne pas conditionner sa prestation télé à la garantie que l’on s’en servira pour placer un laïus sur la presse et ses bourrages de crânes anti-grévistes ?

Pourquoi ne pas se payer le luxe aussi d’envoyer ces guignols se faire voir ?

Au lieu de ça, le Julliard court les plateaux pour l’ouvrir au nom de ceux qui ne lui ont rien demandé tout en fermant le bec sur ses convives. La plupart des AG s’organisent sans leaders ni syndicats ? La base se passe souvent très bien de l’Unef ? M’en fous, c’est tout pour ma gueule !

D’ailleurs, cette manie de dire « je » toutes les trois phrases... T’es un porte-parole, oui ou non ? Alors tu dois dire : « mon orga pense que... », « les copains qui m’ont mandaté veulent que... » Faute de quoi on lit dans les journaux : « Héraut de la bataille contre le CPE, le jeune homme a réussi à faire défiler derrière une même banderole représentants de salariés et de la jeunesse. » (Le Monde, 06/03/06) Trop balèze ! Toul seul le bonhomme a réussi à faire descendre trois millions de gus dans la rue ! Le Monde n’ayant pas publié de rectificatif, on suppose que cette information n’a pas gêné le jeune homme.

Alors on pose la question : sachant que David Assouline (porte-parole étudiant de 1986) est aujourd’hui sénateur de Paris et qu’Isabelle Thomas (autre porte-parole de 1986) est devenue ensuite conseillère à l’Élysée, que sera Bruno Julliard dans vingt ans ?

Publié dans CQFD n°33, avril 2006.

Anonyme a dit…

Il y a pire dans la rubrique syndicat croupion et coquille vide: la confédération étudiante de Julie Coudry.
Un ersatz de syndicat, constituer des éléments les plus a droite de l'UNEF qui a fait scission en demandant de l'argent à la CFDT. Comme son imfane tuteur le syndicat court après les postes et faire élire n'importe quel âne, pourvu que le syndicat soit représenter....

Anonyme a dit…

Exusez moi mais connaissant sa détestation de Segolene, je ne crois pas qu'il devienne ami avec elle.

C'est un bébé Hamon comme Razzye Hamadi...

Gérard Amate a dit…

Pour Julie Coudry, c'est vrai.
Je connais même le nom du mec de la CFDT qui lui écrit son texte quand elle intervient.
Ceci dit, Bruno est plus intéressant parcequ'il est nettement à la gauche du PS, emmanuéliste. (ce qui explique qu'il soit anti-ségoléniste).
Les grévistes se font plus facilement enfler par les syndicats de gauche, c'est bien naturel : alors qu'en réalité, tous les syndicats sont sur les mêmes bases idéologiques, à savoir la délégation de la responsabilité aux partis politiques dès que l'affaire devient chaude, et en conséquence la cogestion des salariés avec les employeurs : ils n'ont que ça à leur vendre, en négociations.
Il faut partiellement excepter SUD, pour SUD-éducation et SUD-rail (mais à peine), et la CNT : ceux-là, qui veulent être reconnus par les autres, sont sur la pente naturelle de les rejoindre, mais, en effet, l'Histoire n'est pas écrite, ils peuvent se radicaliser.

Anonyme a dit…

Effectivement SUD Etudiant se démarque (cf http://www.sud-etudiant.org/).

Ils continuent de rejeter catégoriquement ce 2eme projet !!!!

Anonyme a dit…

Sympa ce petit texte.
C'est dommage qu'il soit...
Comment dire...
Si "haché".
On a l'impression que tu confonds
"espace" et
"saut de ligne" :)
Du coup ça semble participer plus du
slogan assené que du
commentaire construit.
Bon sur le fond,
assez insupportable sur la forme !
Allez a +

vlg a dit…

Pour cambadelis, il était président de la MNEF plutot non ?

Gérard Amate a dit…

Cambadelis n'a pas été président de la MNEF, mais, en effet, qui tient l'Unef tient la Mnef.

Anonyme a dit…

Bien cinglant, ce petit article qui m'interpelle sur deux points :
1)la facheuse tendance du gouvernement à faire voter les projets de lois épineux et surtout stratégiques en jiullet et en aout...et ça marche : exams, festivals, vacances...
Les gens ont oublié que la vigilance citoyenne est priée de bosser à temps plein
2)concernant B Juliard et notre belle jeunesse qui intègrent de plus en plus rapidement l'art de la forme et de l'opportunisme au detriment du fond et du rôle qui incombe (ou qui decombe) de construire sa propre pensée : mais qu'importe car l'important c'est de se placer

Anonyme a dit…

Très cher Gérard,
j'ai bien peur que mon petit dernier ne soit pas en phase avec vos commentateurs. Il va me falloir trouver un autre support pour ma réclame...
Plus positif. Je suis à Tamaris du 14 au 20 juillet. Peut-être aurons-nous là l'occasion de gonfler les bénéfices du complexe alcoolo-industriel.
Réactionnairement vôtre,
JPB.

Anonyme a dit…

Bel article mais le passage sur les vice président d'université manque un peu de documentation...
En effet, le poste de VPE (vice président étudiant), chargé des missions que vous décrivez, existe déjà depuis plusieurs années dans les universités francaises. Ces postes sont effectivement occupés par des responsables locaux de syndicats étudiants (UNEF, UNI) ou des associatifs.
Cette fonction n'était peut être jusque là pas obigatoire, mais au vu du nombre d'universités ayant déjà un VPE, cette loi à elle seule ne saurait justifier le changement d'attitude de Julliard.

Gérard Amate a dit…

En effet : il aurait été plus exact de dire que la réforme sarkoziste des universités est en ligne avec l'accord de Lisbonne signé par le gouvernement Jospin, et c'est la raison principale pour laquelle l'Unef s'installe dans une logique co-gestionnaire aggravée, mais en rendre compte aurait excédé les limites de mon petit post. J'ai préféré faire court en mettant l'accent sur le renforcement de la position de l'Unef dans des conseils d'administrations aux pouvoirs eux-mêmes renforcés.
Merci de vos précisions.

Anonyme a dit…

La TUUD, gauche de l'Unef, (si si) est contre le projet je crois. Allez sur le site http://www.lautrecampagne.org/

ya des ptites vidéos explicatives courtes, pas relou et précises.

A faire passer... Quand à l'article de CQFD il est un poil déterministe nan?

Anonyme a dit…

Super ta manière d'analyser la situation,je n'avais pas tous ces éléments a disposition,mais lorsque j'ai vu ce jeune homme à la télévision lors des fameuse grèves du cpe a travers quelques débats politiques,j'ai tout de suite vu en lui le personnage arriviste et manipulateur qu'il est.Drame a la jeunesse étudiante française qui se laisse manipuler par de tels orateurs et perdent ainsi leur libre arbitre .

Anonyme a dit…

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