Plus je connais Frédéric Mitterrand, et plus il m'épate.ça n'a pas toujours été le cas.
Il me faisait autrefois penser à, je ne dis pas à Bernard Kouchner, n'exagérerons rien, mais à Jack Lang ou Eric Besson.
Tout a changé quand j'ai téléchargé illégalement Fortunat, un film de 1960, avec Bourvil et Michèle Morgan.
12 ans, une tête à claques, Frédéric Robert c'est lui, dans le rôle de Maurice Valencourt, fils de famille arrogant et brillant.
Une autorité, un naturel, une justesse de ton, parfaitement exceptionnels.
Les années ont passé, et puis les décennies, Frédéric n'est plus le même, mais le talent est encore là, intact.
Comme le prouve sa dernière prestation, à TF1, avec Laurence, la journaliste préférée de la famille sarkozyste, dans le rôle du contradicteur.
Et de nouveau, l'admiration m'a submergé.
Quel acteur! Tout est vrai dans son jeu.
Bref, l'autre jour, je me suis empaillé avec Ernest-Edouard à la librairie où je bosse (à l'oeil et lui aussi, nous ne sommes pas vénaux).
Il se demandait pourquoi j'avais dans mon dernier post défendu Polanski, cette hyène cinématographe.
Dans la foulée, je lui ai appris que je défendais également Mitterrand, ce pervers indigne de foi.
Je vous passe son écoeurement (Hé-Hé a des enfants), et sa désolation de constater qu'un anarchiste, un camarade, presque un ami, puisse déplorer l'envoi de personnes en prison.
Remarquez, lui aussi est contre la prison.
Mais pas pour les pédophiles, surtout s'ils sont sodomites (hétérosexuels, je vous rassure, Ernest n'a rien contre les gays).
Ceux-là, tant mieux.
Qu'ils crèvent.
J'eus beau protester qu'il confondait Roman et Fourniret, Frédéric et Dutroux, rien n'y fit.
Bien fait pour eux, c'était son dernier mot.
En désespoir de cause, je tentais d'avancer les arguments de la raison politique : l'oppression, les libertés, la présomption d'innocence, le droit à une justice équitable et sereine.
ça ne fit qu'empirer la situation.
Il ne voulait que les lyncher.
Il allait me taper dessus si j'essayais encore de l'en empêcher.
Nous recommandâmes deux bières (on avait continué au bistrot d'en face), et nous quittâmes bons amis.
Grâce à Dieu, Ernest-Edouard ne sait pas où j'habite.
C'est en toute tranquillité et depuis chez moi que je reprends la discussion.
Commençons par le commencement : j'ai le regret de t'apprendre, Ernest, que la pédophilie n'existe pas plus que les pédophiles, aux yeux de la loi en tous cas (pas sur la tête, s'il te plait).
Le code pénal n'en fait aucune mention.
Je sens que ça va être un peu long, j'espère que tu as tout ton temps.
Le mot pédophilie date de 1968 (excellente année, par ailleurs).
Il désignait, dans l'esprit de l'époque, une forme d'éducation non répressive à l'égard des enfants.
Tout comme le terme pédérastie désignait au départ un moment éducatif chez les Grecs.
Mais celui-ci n'était plus utilisable pour d'évidentes raisons.
On choisit d'en forger un nouveau, qui n'aurait aucune connotation sexuelle.
Ce ne fut pas, comme tu vois, une franche réussite.
Pédophilie a purement et simplement remplacé pédérastie dans le champ sémantique des perversités sexuelles.
La pédérastie, dans la Grèce antique, consistait en une période de deux mois, précédant immédiatement l'accession officielle de l'adolescent au statut d'adulte.
L'impétrant était alors confié à un homme fait, qui complétait son éducation, et recevait en remerciement les faveurs érotiques de son disciple.
Ne me demandez pas si tout ceci était moral ou non.
C'était comme ça, c'est tout, en en tous cas c'était légal.
Dès que le christianisme devint religion officielle dans l'Empire, il mit fin à cette pratique immonde, comme d'ailleurs à toutes les autres en matière de sexualité.
Ne subsista que la position du missionnaire entre personnes religieusement mariées, et à condition de ne pas en abuser.
Au moyen age, l'homosexualité fut nommée sodomie (sur laquelle s'abat la colère du Tout-Puissant), bougrerie (ainsi qu'on appelait le catharisme, "tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens"), ou stupre (lorsqu'il s'agissait d'un adolescent, et c'était le même mot pour les veuves et les jeunes filles vierges).
Au XIXe siècle, on utilisa pédérastie pour désigner les relations sexuelles entre hommes, sans distinction d'age.
On essaya de lui sustituer les termes plus précis de philopédie concernant les garçons et homosexualité concernant les adultes.
Seul ce dernier s'imposa.
Pédérastie se spécialisa alors sur les garçons d'age pubère et pré-pubère.
A la fin du XXe siècle on commença à le remplacer par pédophilie, nouvellement créé.
Sa signification n'est pas encore stabilisée de nos jours.
Elle tend à désigner l'attirance sexuelle à l'égard des enfants, garçons ou filles d'age pré-pubère.
Mais le terme d'éphébophilie pour désigner l'attirance à l'égard des pubères n'a pas d'usage courant.
On utilise parfois le terme de pédophilie, comme un substitut à celui de pédéraste au sens du siècle dernier.
C'est justement cette imprécision du sens qui permet à mon excellent camarade Ernest-Edouard, libertaire depuis toujours, de partager avec Marine Le Pen, fasciste de naissance, la même opinion sur Frédéric Mittérand, homosexuel notoire.
A moi aussi, mon cher Ernest, ces pratiques, à des degrés divers me répugnent.
Mais il ne s'agit pas de nos répugnances.
Il s'agit du droit, de la justice et d'hommes en prison.
Je regardais hier, sur Daily Motion l'intervention du papa de Marine, Jean-Marie.
Il y développait quelques arguments semblables aux tiens, et tout d'abord que Polanski avait violé une gamine.
Du calme, ne nous emballons pas.
Il y a certes eu viol puisque, de toutes façons, elle était mineure.
La loi suppose qu'en raison de leur age, les mineurs ne disposent pas d'un discernement suffisant pour vouloir pleinement une relation sexuelle.
En avoir une avec eux lorsqu'on est adulte constitue un viol.
Mais quant au reste, ça se discute.
Tu as, en bas de ce post, un extrait de la déposition de la victime à l'époque des faits (tiré d'un article de Dominic Lawson du Independant, qui est favorable à l'extradition, la condamnation et l'incarcération de Polanski).
C'est supposé être accablant.
Mais tu remarqueras que le violeur n'a exercé aucune violence physique, ni proféré aucune menace, que la victime ne s'est pas débattue et qu'elle n'a pas crié. Il ne l'a pas prise par surprise, puisqu'ils ont longuement discuté du moyen d'éviter qu'elle ne tombe enceinte, et cela indique au passage qu'il ne s'agissait pas d'une enfant, au sens strict du terme, mais d'une jeune fille pubère (j'y reviendrai).
Jean-Marie, quant à lui, précise qu'elle avait été saoulée et droguée, et ceci explique sans doute cela.
C'est à voir.
La police a établi qu'ils avaient bu du champagne et pris du Quaalude.
Ce sédatif était à l'époque la drogue récréative la plus répandue, pour ses vertus aphrodisiaques, dans le monde anglo-saxon (en France, on utilisait son équivalant, le Mandrax).
Peu d'alcool et peu de Quaalude suffisaient à coucher au sol pendant quelques minutes l'individu le plus résistant, dans un état de béatitude consciente.
A forte dose, des symptômes plus alarmants apparaissent.
Rien de tel dans ce cas.
Il faut croire qu'il s'agissait de doses minimes, seulement faites pour euphoriser.
Ce n'est d'ailleurs pas à cet état artificiel d'euphorie que la victime impute son acceptation de la relation sexuelle, mais à la crainte que lui inspirait Polanski.
Il est tout à fait possible, dans ces conditions, qu'elle ait été violée, mais il est probable, s'il l'a fait, qu'il ne s'en soit pas rendu compte.
Il peut avoir cru, en l'absence de signes évidents de refus, et comme l'indique sa recommandation de ne pas dire à sa mère "notre petit secret", qu'elle avait cédé à ses avances après les avoir, dans un premier temps, refusées.
Quinze jours après la dénonciation faite à la police, on demanda à la jeune fille de déposer en justice.
Concernant le viol, elle refusa.
Les accusateurs ne retinrent contre Polanski que l'inculpation de pratique sexuelle illégale.
La demande d'extradition dont il fait actuellement l'objet y a rajouté d'autres délits, relatifs à l'alcool et à la drogue au cours de cette soirée.
Elle ne mentionne pas le viol.
Contrairement à ce que font Jean-Marie Le Pen ou Daniel Cohn-Bendit.
Eux sont certains du viol.
Après tout, pourquoi pas? Si c'est leur point de vue...
Ils ont seulement tort d'affirmer des choses que la justice n'a pas constatées.
Mais qui sait? Un jour peut-être ils auront raison : le procès le dira.
En ce qui concerne la pédophilie, c'est différent : Jean-Marie calomnie purement et simplement.
Il existe une différence entre puberté et majorité sexuelle.
Cette dernière est à 15 ans et trois mois dans notre pays, 18 en Californie.
En Europe (et sans refaire comme dans mon dernier post le tour du monde des majorités sexuelles) les différents pays la fixent entre 12 et 17 ans (deux à 12, un à 17, et le plus grand nombre à 14 ou 15).
On voit que certains ont choisi un age proche de la puberté, tandis que d'autres on préféré ne pas trop s'éloigner de la majorité civile.
La pédophilie n'a pas de réalité légale : la loi ne parle que d'atteintes sexuelles sur mineurs.
En revanche, elle a une réalité scientifique, pour laquelle une définition a été donnée, et une norme fixée.
Selon le DSM-IV, seule autorité universellement reconnue en la matière, il s'agit d'une "attirance sexuelle pour les enfants au sens d'individus impubères (généralement d'un âge inférieur ou égal à treize ans)" (wikipedia).
La loi française, qui ne parle pas de puberté, la reconnait de fait, au même age que donne le DSM-IV..
Elle précise que les atteintes sexuelles sur mineurs sont plus graves lorsqu'il s'agit d'enfants de 13 ans ou moins.
Or, la victime de Polanski allait avoir 14 ans dans deux semaines et elle était, selon sa déposition, pubère.
Polanski a un problème avec la loi californienne fixant la majorité sexuelle à 18 ans. Il en aurait eu aussi un en France (15 ans), mais aucun aux Pays-Bas (12) ou en Espagne (13), et nulle part pour pédophilie.
Sauf, évidemment, auprès de Jean-Marie et de tous ceux qui, soucieux d'avenir et de modernité, voudraient étendre le champs des interdits sexuels liés à l'age au delà de celui fixé par l'église catholique (12 ans elle aussi : en-dessous, c'est du stupre).
Ce qui vaut pour Polanski vaut a fortiori pour Frédéric Mitterrand.
Jean-Marie, élargissant le concept de pédophilie à l'attirance pour les éphèbes, dont Frédo serait friand, prétend qu'il ment lorsqu'il prétend n'avoir baisé en Thaïlande qu'avec un camionneur et un ex-boxeur.
Et qu'il s'agit en réalité d'un pédophile.
D'une part je lui ferai remarquer qu'on peut être redoutable au combat tout en étant imberbe, comme l'étaient Alexandre le Grand et la plupart de ses compagnons, justement appelés l'éphébie.
La poésie grecque caractérisait l'éphèbe comme un jeune homme aux cuisses sans pilosité et au visage sans ride.
On peut avoir longtemps cette apparence.
J'ignore si Jean-Marie fréquente beaucoup les asiatiques.
Parmi ceux que je connais, il y en a beaucoup, adultes, qui correspondent à la description que les Grecs faisaient des éphèbes.
Alors, pourquoi pas un camionneur et un ex-boxeur?
Tu m'as dit, Ernest, qu'il n'était de toutes façons pas question de défendre deux individus, Polanski et Mitterrand, qui n'avaient rien à voir avec nous, et n'étaient pas de notre bord.
Je suis bien certain que la majorité de nos camarades est du même avis que toi, mais je le déplore.
La politique ne consiste pas à seulement s'intéresser aux gens que nous trouvons sympathiques.
Elle consiste aussi à défendre nos principes, parmi lesquels le lynchage ne figure pas.
Dominic Lawson: Let's not forget what Polanski did
Tuesday, 29 September 2009
"Q. What did you do when he said, 'Let's go into the other room'?
A. I was going 'No, I think I better go home', because I was afraid. So I just went and I sat down on the couch.
Q. What were you afraid of?
A. Him.... He sat down beside me and asked if I was OK. I said 'No'.
Q. What did he say?
A. He goes 'Well, you'll be better'. And I go, 'No I won't. I have to go home. He said 'I'll take you home soon'.
Q. Then what happened?
A. Then he went down and he started performing cuddliness... I was kind of dizzy, you know, like things were kind of blurry sometimes. I was having trouble with my coordination... I wasn't fighting really because I, you know, there was no one else there and I had no place to go."
Q. Did he ask you about being on the pill?
A. He asked, he goes, 'Are you on the pill?' and I went, 'No' and he goes 'When did you have your period?' and I said, 'I don't know. A week or two. I'm not sure'... He goes, 'Come on. You have to remember'. And I told him I didn't.... and right after I said I was not on the pill... and he goes... and then he put me – wait. Then he lifted my legs up farther and he went in through my anus.
Q. Did you resist at that time?
A. A little bit, but not really, because...
Q. Because what?
A. Because I was afraid of him."
This testimony took place barely two weeks after the incident – Samantha Galley did not obey Polanski's demand that she not tell her mother about "our little secret."